Après l’affaire « Le genou n’est pas un genou… », ma chère Barbara m’a écrit ceci :
Réponds à cette question : si la Forme nous dit comment un patient « est devenu comme ça », comment nous dit-elle comment le traiter ? Lancé comme un défi…. restant collé à ma chaise abruzzaise, ressemblant à une aubergine et pleurant mon Defender bien-aimé, je reprends le fameux stylo… Mais celui-ci est aussi pour mon ami britannique Robert, qui est en train de démêler la forme de Still, peut-être que ça l’aidera ?
Eh bien, pour commencer, la Forme ne nous dit pas comment un patient est devenu comme ça, et certainement pas comment le traiter … OMG, la forme ressemble presque à une baguette magique d’un film d’Harry Potter. Donc, comme dans le dernier chapitre du livre « Jonathan Livingstone le Goéland », je vais citer le Goéland Martin après avoir poussé un profond soupire : « Ok les enfants, reprenons tout depuis le début …. » magnifique hein ?
Qu’est-ce que je comprends de ce que Andrew Taylor Still voulait dire avec FORM ?
La FORME, ce n’est rien d’autre que la réalité du vivant, c’est tout.
Pour ceux qui savent écouter, tout est dit ; mais il est clair que cela ne suffit pas pour beaucoup, alors pour tous les autres : les bébés ostéos et les professionnels plus âgés qui n’ont jamais eu la chance ou la curiosité de creuser les pensées de notre cher Drew, ou qui ont vu leur curiosité étouffée ou matraquée à mort par le syndrome tant redouté et pourtant si souvent utilisé du « Jacques a dit bonjour », et qui ont probablement été nourris de quelques citations stupides, non pertinentes ou même fausses de Still, je vais essayer de mettre certaines d’entre elles sur papier, mais attention : ce sont mes pensées, mes interprétations et mon expérience, et non un texte sacré gravé dans la pierre.
Habituellement, dans le cadre du cours post-grad EVOST (Evolutionary Medicine within the Osteopathic Field, à Maaseik, en Belgique), je commence le premier séminaire en disant : ne croyez jamais et ne faites pas confiance à l’idiot qui se tient devant vous (en l’occurrence moi) mais PENSEZ, VERIFIEZ et RAISONNEZ par vous-mêmes. EVOST est un cours de troisième cycle, oui, mais c’est d’abord et avant tout une ATTITUDE, c’est pourquoi c’est un cours de philosophie ; et oui, nous, à Morphologicum, allons probablement enseigner des choses dont vous n’avez jamais entendu parler, ainsi que des choses que vous pensez savoir mais qui vous feront peut-être voir d’autres aspects et angles que vous n’aviez pas auparavant… mais s’il vous plaît ne le prenez pas pour des vérités, ces cours sont nos recherches – compréhensions – intégrations et expériences personnelles, alors questionnez-les et raisonnez par vous-mêmes.
Il en va de même pour tout ce que j’écris, oubliez ‘Jacques a dit’ et raisonnez par vous-mêmes. Cela étant dit…
Si la forme nous dit comment un patient « est devenu comme ça », comment nous dit-elle comment le traiter ?
LA FORME EST. Point final ; votre compréhension et votre connaissance des principes de la Nature en action peuvent vous dire comment cette Forme est apparue, dans certaines de ses dimensions du moins, si vous apprenez à la lire.
La première chose à faire est donc d’étudier la nature et ses principes. C’est une question délicate car vous êtes automatiquement poussé vers le monde universitaire, qui est fantastique pour diviser la « Nature et la Forme » en petits morceaux et les décrire de manière factuelle, mais il y a deux pièges majeurs à cela : le premier est leur tendance à « régresser à l’infini », qui tue l’observation et qui est très virtuelle, ce qui vous éloigne de votre objectif et de votre but. Le second est qu’en découpant tout en morceaux, ils détruisent le comportement émergent et les caractéristiques émergentes et y sont complètement aveugles. Vous pouvez donc vous familiariser avec la théorie des systèmes et la théorie de la complexité pour en prendre conscience et en maîtriser une partie. Parce que le monde universitaire est généralement très bon dans ce qu’il fait DANS LES PARAMÈTRES qu’il a fixés (qui ne sont par définition jamais aussi complets que dans la nature), c’est une bonne et rapide voie d’apprentissage, mais à consommer avec un raisonnement actif. Utilisez la science pour ce pour quoi elle a été conçue : une méthode de vérification qui vous donne des probabilités et non des vérités ou une nouvelle foi.
Maintenant, tous ces petits faits doivent s’assembler de manière à devenir un flot, un processus, et non pas simplement des choses en vrac, mais les fondre dans quelque chose qui ressemble à un tout. (L’embryologie, l’histologie, la morphologie, l’anatomie et la physiologie sont des terrains de chasse fantastiques pour ça, si vous êtes curieux et que vous vérifiez les choses réelles et pas seulement les adaptations de modèles de livres. Microscopie, dissection, etc.)
Ensuite, faites vôtres ces principes, observez et voyez-les à l’œuvre partout où vous le pouvez, mais (et sachez que je suis partial), la nature et la conscience sont votre meilleure salle de classe à mon avis. Le problème est que ce que la plupart des gens dans notre société appellent la Nature aujourd’hui est une mauvaise représentation. Pour rester conscient, la nature doit être réelle, ce qui peut être dangereux, d’où la nécessité d’être en permanence pleinement conscient, et de s’occuper de choses très concrètes, comme un ornithologue désireux de savoir tout ce qui se trouve dans sa région, ou comme un collectionneur de plantes dans la nature, ou comme un chasseur, un pisteur… soyez vraiment là, ne vous promenez pas et ne vous égarez pas dans vos pensées.
Et tout au long du chemin, lisez, la philosophie de l’ostéopathie et la philosophie et les principes mécaniques de l’ostéopathie (le petit livre vert), et comme dit précédemment, lisez-le avec le Webster 1828 qui était son dictionnaire. Et réfléchissez, relisez et raisonnez avec les connaissances que vous avez… c’est une suite sans fin de réitération sur la réitération…
Comment un patient est devenu comme ça : Oui peut-être, mais je vois plutôt comment sa forme, qui fait toujours ce qu’elle peut dans ces circonstances, en vertu du principe naturel selon lequel les interactions locales génèrent un ordre global, le fait. Donc, le pourquoi et le comment, oui peut-être, mais ce qui est plus intéressant, c’est de savoir pourquoi elle doit se comporter, se structurer et fonctionner comme elle le fait. Pourquoi n’est-ce pas plus adapté ? Pourquoi la forme nous montre-t-elle des schémas ? Une forme saine est sans schéma. Et avant que les réactions surprenantes ne commencent : il y a une trentaine d’années, il m’a fallu un certain temps pour comprendre cette étrange expression Stillienne, parce que, comme la majorité des gens, je suis aussi coincé dans une ornière, et en sortir est un travail de conscience quotidienne difficile, mais en tant qu’histologiste amateur, micro et macro-anatomiste, la seule chose que je voyais était des schémas ! Ça m’a donc demandé de repenser à ce que le vieux docteur voulait dire…
Une polarité génère un schéma.
Schéma = un champ de force et une tension qui fait bouger les choses ou l’ensemble des changements de position des éléments et en tant que tel un mouvement ou un ensemble de stimuli.
Stimuli = l’environnement a des impacts sur les systèmes présents générant un changement de forme ou une réaction de la forme (pour faire simple).
Ces changements de forme peuvent éventuellement changer tout l’environnement de manière visible en générant de nouvelles polarités souvent dans une autre dimension et en changeant ainsi la forme de l’ensemble (zoom arrière).
Ce sont les principes en action ou le Mécanisme comme nous aimons l’appeler dans Evost.
C’est le long et sinueux chemin que j’ai emprunté, vous pouvez aussi interagir avec des personnes qui ont fait ce genre de chemin ou un chemin similaire sur les écrits et les pensées de Still et apprendre d’eux en tant que mentors, mais faites-en votre propre raisonnement ! Ne prenez jamais les secondes opinions pour argent comptant, ce ne sont que des secondes opinions même si parfois elles sont excellentes… et interagir avec d’autres personnes sur le même voyage apprend beaucoup aussi… Et ces gens de la route se reconnaissent vite, comme les gitans, ils sont généralement individualistes mais du même clan…
Alors, quelle est ma compréhension de la FORME de Still aujourd’hui ?
La forme est la réalité du moment, ce n’est pas la structure ou la fonction, ni même le comportement, c’est le tout, c’est comment la Forme est née, son histoire – son ascendance, l’ensemble de ses expériences, sa hiérarchie – sa chronologie, c’est sa façon de se comporter – fonctionner à chaque instant, ses relations positionnelles, son anatomie et sa morphologie et en même temps son potentiel dans le futur, tout en un dans toutes les dimensions perceptibles pour nous…
Et alors que je travaillais avec un patient à la fin d’une incroyable expérience de traitement, le genre de traitement pour lequel vous avez honte de demander de l’argent parce que c’était une si belle expérience où tout dans la pièce se calme et est paisible et où la santé s’ouvre partout… Ça m’a frappé comme un coup de massue : le vieux docteur ne parlait pas de structure mais de FORME comme d’habitude. (Presque par réflexe, lorsque je palpais activement (maudites habitudes inconscientes), l’esprit anatomique en moi me faisait errer vers la structure (maudit cerveau éduqué), et ce n’est que l’expression du schéma (stress) tel qu’il est résolu par le corps, et lorsque je laisse ça prendre le dessus, il n’y a plus de modèle dans la sensation. L’écoute, la perception, la palpation réceptive lorsque vous avez terminé votre travail, est sans schéma, vous savez que les structures à l’intérieur sont organisées et de même que les porteurs du schéma, mais lorsque tout fonctionne sans accroc, (la santé) il n’y a plus schéma, le tout est juste entier et fait son lent mouvement expansif sans directions spécifiques décelables, juste une expansion générale…
J’ai une idée pour ceux qui ne comprennent pas: regardons les principes de la FORME qui fait du pain, essayez de suivre avec les yeux d’un enfant et de raisonner a posteriori…..
Faire du pain du point de vue du Mécanisme , d’abord les principes :
Voyons maintenant à travers un exemple où le parti pris professionnel et la vision tunnel de l’ostéopathe doivent être contournés : FAIRE DU PAIN et la FORME comme solution pour les SCHEMAS.
Farine (système complexe donc non vivant : biomolécules : Principalement de longues chaînes polymérisées de glucides et de quelques protéines (CHO et CHON SP).
Levure (système complexe donc vivant) : champignon unicellulaire
Eau (système complexe non vivant : molécules inorganiques dipolaires en réseau (H2O))
Sel de cuisine (système complexe non vivant) : molécule inorganique NaCl
Mélangez bien le tout mais sans l’eau, rien ne se passe ?
Bien qu’il y ait clairement une énorme polarité dans le mélange, certainement beaucoup plus de sucres à l’extérieur (dans leur environnement) des unicellulaires qu’à l’intérieur… mais visiblement rien ne se passe ?
Pour faire bouger les molécules et les éléments, il doit y avoir un support, une substance à travers laquelle ils peuvent se déplacer facilement et qui permet au mouvement de résoudre rapidement la polarité, surtout pour les grandes et longues chaînes de molécules polarisées… Sinon, la polarité est présente mais il faudrait un temps énorme pour révéler le mouvement. Un peu de jugeote ?
Maintenant, ajoutez l’eau au mélange et continuez à mélanger jusqu’à ce qu’il soit plus ou moins homogène : une belle pâte collante.
Si vous avez un environnement relativement stable : pas de lumière UV, température ambiante stable et humidité dans cet environnement, on peut facilement observer l’action : afin de faciliter ces conditions, mettez la pâte dans un récipient ouvert et couvrez-le d’un chiffon humide (pour assurer un microclimat et des conditions stables).
Comme la polarité a maintenant un support pour exprimer le mouvement, les cellules de levure unicellulaires sont bombardées de stimuli physico-chimiques, le bord du chaos est maintenant si proche qu’il menace leur ancien ordre équilibré et homéostatique (leur FORME).
Comme les organismes de levure avaient déjà leur FORME, ils risquent d’être gravement perturbés et doivent réagir pour maintenir leur Forme = caractéristique de la rigidité dans le langage des systèmes complexes. Ces cellules vivantes, en tant que système adaptatif complexe, ont un certain nombre de possibilités de réponses limitées, celles qui s’expriment sont cumulatives et dépendent de la qualité de la perturbation des stimuli environnementaux :
Absorption du stimulus
Métabolisation du stimulus
Ces deux premières étapes constituent ce que nous appelons la physiologie normale ou homéostasie.
Mais comme le bombardement de stimuli dans la pâte est grandement perturbateur, ils doivent intensifier leurs réactions :
Changement de forme réversible (tenségrité) = les organismes gonflent ou rétrécissent.
Mais si ça ne rétablit toujours pas l’équilibre dans la pâte (ce qui n’est pas le cas), ils doivent monter d’un cran dans leur réaction :
Changements de forme irréversibles (réplication ou réorganisation interne comme nous l’appelons) = les organismes commencent à se répliquer rapidement tout en poursuivant les réactions de base :
Absorption
Métabolisation
Changement de forme réversible
Changement de forme irréversible (réplication)
La deuxième vitesse de la réaction est intéressante à observer, et à zoomer : la métabolisation des stimuli démontre un comportement émergent : le sucre (C6H12O6 est décomplexifié ou décomposé en CO2 et H2O et sécrété par les cellules). Mais les protéines du mélange rendent la pâte très collante et adhérente, ce qui signifie que le gaz et l’eau restent pris dans le mélange = la pâte lève et se remplit de bulles.
Ces processus se poursuivront jusqu’à ce que l’ensemble du système (la pâte) ait atteint un nouvel équilibre …(réduit la polarité)
Maintenant, c’est au tour du schéma ! Soyez attentif et faites un zoom arrière avec moi !!!!! Voyez ce qui se passe avec l’œil de votre esprit !!!
La pâte (dans le bol) est composée d’un nombre croissant de cellules vivantes (CAS) et peut, à ce moment-là, être considérée comme commençant à se comporter comme un CAS lui-même, dans le sens où elle démontre les propriétés d’un CAS. Ce qui signifie que la pâte dans son ensemble change également de forme et subit l’influence des conditions dictées par son environnement. (stress)
Comme nous avons mis la pâte dans un contenant rigide et non élastique, la pâte en train de lever et de se dilater dans toutes les directions exerce une tension sur le récipient qui n’en a rien à faire et renvoie la tension à la pâte (pour faire simple). Ainsi nous voyons la pâte changer de forme par nécessité et s’étendre vers le haut (la voie de la facilité ou de liberté et un schéma apparaît dans la pâte). Voyez comment la forme change à nouveau quand elle sort du récipient et n’est plus contrainte… le seul schéma qui reste c’est la gravité qui agit sur elle.
Ainsi notre pâte a dans son corps un schéma clair et sur le dessus beaucoup moins ; mais supposons que cette partie soit sans schéma pour des raisons de simplicité…
Comme notre four n’est pas un four professionnel et a donc un volume réduit, nous ne voulons pas d’un pain gigantesque, alors nous allons le mettre au four maintenant… Que se passe-t-il lors du choc thermique ?
Pendant la cuisson du pain, nous arrêtons et mettons définitivement en attente le processus en tuant la population de levures encore en expansion. Oui, pour elles, c’est un événement d’extinction de masse, elles se décomplexifient toutes et par là, nous dénaturons aussi les protéines et évaporons une partie de l’eau. En d’autres termes, nous transformons un CAS en CS, nous rigidifions ou figeons la forme telle qu’elle est sur le moment.
Si tout s’est bien passé et que la pâte était un mélange bien homogène, vous ne pouvez pas voir le schéma dans la mie du pain, tel qu’induit par le récipient. Vous pouvez le voir dans la forme du pain entier, oui, mais si vous le palpez doucement, la forme ne montre pas de schéma spécifique dans son ensemble, le schéma a disparu à l’intérieur de la mie… la forme a absorbé le schéma ; c’était la solution et le schéma n’est plus là intrinsèquement…. est-ce que ça fait sens ?
La forme est l’expression momentanée, le résultat ou l’expression momentanée du mécanisme vivant qui traite une polarité ; le résultat généré est que, dans la forme, il a créé et organisé une nouvelle polarité, mais plus complexe et dans une autre dimension (Espace-temps).
Max GIRARDIN
Traduit de l’anglais par Matthieu LARIDON
Je ne sais pas si c’est utile, chers lecteurs, c’était un essai, un peu long peut-être, mais raisonnez et observez les principes à l’œuvre dans la Nature, ils sont partout….Still a juste essayé de décrire la complexité qu’il a vue dans la Nature et certains de ses principes à l’œuvre… ainsi que leur hiérarchie et leur chronologie…enfin il me semble.
Et par là, il n’a pas essayé de nous apprendre des tours de singe pour le traitement, mais il a essayé de partager les principes qu’il a vus et reconnus et qui peuvent être appliqués dans le diagnostic et le traitement…. C’est comme ça que je comprends le Vieux Docteur…..
Merci à Richard Douglas de Daktylus qui a extrait ceci du petit livre vert…
Drew le dit simplement, un schéma est quelque chose d’anormal (quelque chose qui va induire un changement de la FORME), il faut s’en débarrasser et laisser la normalité revenir à la maison… travail terminé. (La FORME peut à nouveau fonctionner en homéostasie naturelle, sans trans-FORM-ations « fonctionnelles et structurelles » d’urgence).
Une autre excellente image de la Forme a été donnée par Richard Douglas
https://www.linkedin.com/pulse/philosophy-mechanical-principles-osteopathy-max-girardin/
Santé, et ne croyez pas ce vieux fou fumeur de pipe, lisez le petit livre vert de Drew et surtout raisonnez par vous-mêmes !!!!.
Santé, en provenance des Abruzzes