Tania est une chienne courante âgée d’environ 8 ans, adoptée à la SPA il y a environ 1 an. Depuis son arrivée dans cette nouvelle famille, elle vomit régulièrement son repas, ces vomissements s’accompagnent d’une parésie du train postérieur.
Après plusieurs examens complémentaires, le diagnostic de mégaoesophage est posé. Les radios sont sans appel.
Un traitement classique à base de bromure de pyridogstimine est mis en place. Ce traitement est administré depuis quelques temps avec un succès mitigé quand Tania est présentée à la consultation d’ostéopathie.
Cette première consultation révèle des dysfonctions en C0, D4, D13, jonction lombo-sacrée et oesophage, en particulier au niveau des plexus de Meissner et Auerbach, qui présentent respectivement un défaut de mouvement et un hyperfonctionnement. Le traitement, en plus des corrections fonctionnelles des dysfonctions vertébrales a consisté à réguler l’activité nerveuse, à savoir stimuler celle du plexus de Meissner et diminuer celle du plexus d’Auerbach. Le traitement médical est maintenu pour le moment.
Suite à cette première intervention, la chienne, après deux jours de fatigue importante, s’est mise à vomir plusieurs fois par jour, et ce pendant cinq jours. Lors de la consultation suivante, l’oesophage semble stabilisé, mais le cardia est toujours en dysfonction, ainsi que la thyroïde qui présente des tensions importantes. Les deux séances suivantes consisteront à travailler sur ces deux points. Parallèlement , le traitement est diminué progressivement.
La manipulation du cardia est en général suivie de vomissements importants sur quelques jours, mais sans troubles locomoteurs, puis de phases absolument sans aucune régurgitation.
Lors de la dernière visite, il n’y a plus aucune dysfonction et Tania ne vomit plus, malgré des doses divisées par 4.
Discussion
L’oesophage du chien est constitué entièrement de fibres striées; les fibres lisses sont seulement présentes au niveau du cardia. On peut observer deux rétrécissements, un à l’entrée du thorax et un lors du passage du diaphragme.
L’innervation parasympathique extrinsèque est assurée par le nerf vague, et il existe également une innervation intrinsèque parasympathique via les plexus de Meissner et d’ Auerbach, situés dans la sous muqueuse et la musculeuse du tube digestif. Ces derniers contrôlent le péristaltisme, l’activité myogène et sécrétoire de l’oesophage.
La pyridogstimine inhibe l’acétylcholinestérase en se fixant sur le site anionique de l’enzyme. Elle potentialise donc l’action de l’acétylcholine, en augmentant sa concentration dans la fente synaptique ( on parle d’action parasympathicomimétique indirecte), acétylcholine qui va se fixer sur les récepteurs muscariniques et provoquer ainsi une augmentation du péristaltisme et des sécrétions digestives.
La levée des tensions de la zone nuchale permet en général le rétablissement des fonctions vagales perturbées par l’irritation de la dixième paire crânienne dans cette région; mais dans ce cas, on agit alors seulement sur l’innervation extrinsèque de l’oesophage, ce qui est largement insuffisant dans ce type de pathologie. Il est indispensable de rentrer au coeur du tissu pour agir sur l’innervation intrinsèque, afin de réguler la production d’acétylcholine et , par là même, contrôler le péristaltisme et les sécrétions glandulaires.
Au vu des résultats obtenus (plus aucun vomissements ni régurgitation), les manipulations ostéopathiques apparaissent beaucoup plus efficaces et durables qu’un traitement médicamenteux palliatif qui nécessite une administration quotidienne. De plus , la pyridogstimine n’a pas une action sélective sur l’oesophage et peut donc présenter des effets secondaires non négligeables.
Une fois de plus, le cas de Tania prouve que l’ostéopathie offre des applications bien plus larges que la simple correction des troubles locomoteurs.
70 – dépêche vétérinaire de Janvier 2010
26 novembre 2009 12:10, par William Addey
Joli cas, « Le traitement, en plus des corrections fonctionnelles des dysfonctions vertébrales a consister à réguler l’activité nerveuse, à savoir stimuler celle du plexus de Meissner et diminuer celle du plexus d’Auerbach. »
Est ce que tu peux préciser quels sont les tests et les techniques que tu utilisent pour ces plexus, Merci.
70 – dépêche vétérinaire de Janvier 2010
26 novembre 2009 13:42, par Pascale Monferran
C’est très empirique, mais je vais tenter d’expliquer : quand je me suis « fixée » sur sur le plexus de Meissner, j’ai ressenti un « vide », rien ne bougeait. J’ai donc « envoyé » de l’énergie dessus et le mouvement a repris (un mouvement vertical, de haut en bas). Inversement, sur le plexus d’Auerbach, j’avais un genre de tourbillon dans les mains. Là, je l’ai stoppé et un mouvement de contraction/relâchement régulier a succédé au « still point ». C’est un peu difficile à décrire et je ne sais pas si cela correspond à une technique particulière, n’ayant pas trop d’expérience.
70 – dépêche vétérinaire de Janvier 2010
10 août 2010 12:27, par François Mériaux
Bonjour, bravo pour ce cas clinique très intéressant et surtout très encourageant pour tout ces chiens qui souffrent de cette pathologie. Où place tu tes mains pour écouter les plexus et le cardia ? Penses tu que leur place ai un intérêt ou seule l’intention compte ?
70 – dépêche vétérinaire de Janvier 2010
10 août 2010 14:43, par Pascale Coatantiec-Monferran
C’est évidemment l’intention qui compte…, mais j’ai essayé d’être très précise dans mes représentations mentales et pour cela les cours d’anat de Claire , ainsi que les dissections m’ont beaucoup aidé. A ce jour, la chienne n’a plus aucun traitement depuis plusieurs mois et n’a eu qu’une seule « rechute », suite à un gros stress. Effectivement, je pense que c’est très encourageant pour tous les autres chiens avec un mégaoesophage, mais je n’ai pas eu l’occasion d’en traiter d’autres (cela devait être le 2ème ou le 3ème cas que je voyais. J’attends avec impatience d’autres cas identiques traités par des confrères…