
Compte-rendu

Les différents exposés
Matteo Turinetto D.O. M.Sc.Ost, expose son point de vue en premier sur la nécessité de mettre en place des dispositifs pédagogiques adaptés pour l’approche du raisonnement clinique ostéopathique (ROC). L’information et la participation active du corps professoral sont essentielles à l’alignement efficace entre les objectifs et le projet pédagogique. Tim Daelemans est le directeur de l’académie d’ostéopathie FICO (8). Sa posture d’enseignant en formation initiale, ainsi que ses compétences au niveau Universitaire expliquent la posture de Tim vis-à-vis du manque d’esprit critique des étudiants en abordant les tests médicaux (EBM) et ostéopathiques. Il propose de mettre en avant un outil d’évaluation permettant aux écoles d’évaluer les différentes caractéristiques des processus diagnostiques qu’elles enseignent aux élèves. Hakim Mhadhbi, responsable du département clinique Io Rennes, soumet l’utilisation de la technologie vidéo associée à une solide méthodologie d’analyse pour fournir aux étudiants une rétroaction sur les consultations qui pourrait optimiser l’acquisition des compétences cliniques, essentielles pour le diagnostic ostéopathique. Cette étude fait suite aux travaux effectués (9) entre 2015 et 2017 avec l’aide du CREA (Centre de ressource et d’études audiovisuelles de l’Université de Rennes) et du Laboratoire CREAD (Centre de recherche sur l’éducation, les apprentissages et la didactique), ces étudiants ont produit des enregistrements (10) destinés à construire leur démarche. Philippe Gadet D.O, que j’ai rencontré plus tard, présente un parcours atypique (11) comme ma consœur Yun Kyung KIM de MONTEBELLO (12) ! L’intervenant nous explique que les tests médicaux sont standardisés, publiés et globalement validés par des études et des recherches. Il propose une standardisation des tests pour une plus grande efficacité clinique. L’enseignement des tests médicaux présente de nombreux avantages. Résultats, un livre (13) avant de finir ses études en 2017 et plusieurs projets dans différents domaines scientifiques et d’enseignement chez cet hyperactif. Christian lunghi, ostéopathe et naturopathe à Rome, membre du COME, et membre du Groupe de travail sur les compétences essentielles du ROI. Il donne des conférences sur le raisonnement clinique ostéopathique et la rationalité de la médecine ostéopathique. Il est auteur et coauteur d’ouvrages et de publications (14) dans des revues indexées. Son intervention est volontairement déroutante car il évoque l’approche du raisonnement clinique (15) à la lumière du cadre Cynefin (Van Beurden et al, 2011) : un modèle d’exploration de la relation entre l’homme, l’expérience et le contexte, qui permettent de nouvelles approches de la prise de décision dans des environnements complexes tels que l’ostéopathie (16). Cette intervention m’interpelle par rapport à un essai de modélisation des savoirs en ostéopathie par Philippe Brousseau (17) en 2013. Franck Garnier, Ostéopathe D.O et enseignant au COS de Strasbourg depuis 5 ans, Il obtient une maîtrise en pédagogie médicale à la Faculté de médecine de Strasbourg et prépare actuellement un doctorat en sciences de l’éducation à l’Université de Strasbourg. On découvre l’utilisation d’un outil pédagogique OSCE (18) (Objective Structured Clinical Examination) pour l’évaluation (19) de la compétence clinique (20), peu utilisée en France. Dans l’étude en cours, l’utilisation des stations de l’OSCE concerne l’évaluation de la compétence clinique du diagnostic d’opportunité. Rick Rik Hoste DO, donne son point de vue sur l’approche réductionniste des ostéopathes en évoquant le concept de traiter la cause pour soigner les effets ! Il pose la question de l’approche globale ou holistique des ostéopathes face au raisonnement clinique qui précède le diagnostic ostéopathique. Pour l’intervenant, l’important est de répondre à cette question : que vais-je traiter et comment vais-je traiter ? Sandra Grace (21) PhD, MSc., DC, D.O., BA, directrice de la recherche à la School of Health and Human Sciences et vice-présidente du Academic Board (Research) de la Southern Cross University. Enseigner aux étudiants en santé à utiliser et à mettre en œuvre les données probantes dans la pratique clinique peut s’avérer difficile. Le modèle de supervision clinique SNAPPS-Plus (22) est conçu pour développer les compétences des étudiants en pratique clinique fondée sur des preuves dans un cadre structuré de supervision clinique. Les étudiants ont d’abord résisté à l’idée d’entreprendre le travail supplémentaire de récupération et d’évaluation des données probantes pertinentes sur le plan clinique afin d’éclairer les plans de traitement de leurs patients, mais leur capacité de trouver et d’utiliser des données probantes pertinentes sur le plan clinique s’est améliorée au cours de l’essai. Oliver Thomson, Ostéopathe, propose un atelier sur le raisonnement clinique en ostéopathie est un processus multidimensionnel qui comprend les éléments fondamentaux de la connaissance, de la cognition et de la métacognition, qui sont appliqués dans un cadre philosophique ostéopathique. Ce processus de raisonnement clinique contient des éléments qui viennent étayer certains cadres théoriques proposés pour la profession ostéopathique. Cependant, les hypothèses formulées concernant le caractère unique du raisonnement clinique ostéopathique ont été remises en question. Il est avancé que les modèles contemporains de raisonnement clinique en médecine et en thérapie manuelle contiennent des éléments qui sont communs à l’ostéopathie. Il est donc essentiel que l’enseignement et l’évaluation du raisonnement clinique en ostéopathie s’appuient sur les recherches publiées dans ces professions. Hans Fauville MSc. Ost D.O., maître de conférences à l’Académie d’Ostéopathie FICO, professeur de cours de troisième cycle international, vice-président de l’Académie d’Ostéopathie FICO. Il nous explique pourquoi on retrouve une telle disparité dans le diagnostic ostéopathique, à partir de la littérature, mais également des exemples simples qui évoquent les problématiques spécifiques à chaque pays. Des hypothèses sont soumises à partir de ce constat pour des propositions qui visent un cadre commun. Aurélien Noyer (23) M.Ost, BSc., diplômé de la BSO, sorti en 2017 et un BSc (Hons) de l’Université de Birmingham en 2013. Il présente une étude pilote sur les difficultés rencontrées par les étudiants ostéopathes pour établir un diagnostic à partir du raisonnement clinique. L’objectif était de vérifier les critères qui empêchent les étudiants d’établir des liens entre les connaissances acquises et le processus du raisonnement clinique. Karine Gagnon et Geneviève Lord-Bentkowski, ostéopathes D.O, issues du Centre Ostéopathique du Québec, proposent pour finir l’utilisation de scénarios de cas cliniques (CCS) pour évaluer le raisonnement ostéopathique avec de nombreux avantages. Ils constituent des évaluations authentiques, exigent des élèves qu’ils mobilisent leurs connaissances déclaratives, procédurales et conditionnelles, peuvent servir d’outils d’évaluation formative et sommative, et développent des compétences transférables pour les élèves. J’ai également participé à 2 workshops dans l’après-midi de jeudi 18 octobre : le premier sur la standardisation des tests clinique par Philippe GADET, qui proposera à l’assemblée une séance de brainstorming par petit groupes pour définir les priorités par rapport à 5 questions fondamentales lors de la consultation, ce qui montrera une fois de plus la convergence des pratiques mais la diversité des situations d’exercices. De même dans l’autre atelier avec notre ami Christian LUNGHI, la difficulté éprouvée par un groupe hétérogène d’ostéopathes (culture, formation, législation, pays) autour de l’interprétation des compétences observables et mesurables lors d’une consultation. Durant ces 2 journées, j’ai pu prendre connaissance des problématiques exposés par chaque pays, en fonction du contexte, mais également des efforts constants au sein d’un groupe pour soumettre, comparer et évaluer les besoins en pédagogie afin de répondre aux exigences d’une formation ostéopathique de qualité, au moins sur le plan Européen.Mon retour d’expérience
J’étais très impatient de découvrir de l’intérieur le fonctionnement d’une part du groupe OsEAN, mais également de partager avec mes collègues les propositions et travaux effectués par les intervenants sur des sujets concernant la pédagogie, et plus spécifiquement le raisonnement clinique en ostéopathie. Je connaissais déjà les travaux de Sandra Grace et d’Oliver Thomson, tant sur le plan qualitatif que sur la méthodologie utilisée pour l’expérimentation. C’est d’ailleurs principalement à partir de leurs travaux que j’ai proposé un article (24) en août 2016 sur le Site de l’Ostéopathie. J’ai également apprécié les interventions qui prônaient plus de rigueur dans l’établissement de tests médicaux plus maîtrisés, mais également des tests ostéopathiques validés par le plus grand nombre. Ce qui signifie clairement pour tout le monde, l’importance d’avoir un discours commun…. Ce qui est surprenant à travers toutes les interventions, c’est de ne pas mettre en avant la nature de l’objet, sa définition et son évaluation dans le système de formation pour ostéopathes. Au regard des Sciences de l’Éducation, le premier point important qui me vient à l’esprit : de quoi parlons-nous quand on évoque le Raisonnement Clinique Ostéopathique ? La réponse à cette question est déjà abordée dans l’article (25) de Sandra Grace lorsqu’elle soumet une conclusion : « Il existe des modèles de raisonnement de diagnostic en ostéopathie qui sont basés sur la relation entre la structure et la fonction dans le corps humain à différencier du raisonnement clinique en médecine. Ces modèles ne sont pas utilisés pour nommer une condition médicale, mais plutôt pour guider la sélection (26) des choix de traitement. Si des recherches plus approfondies confirment que le raisonnement clinique en ostéopathie est distinct du raisonnement clinique dans d’autres professions de la santé, alors les ostéopathes peuvent avoir une perspective unique à apporter à la prise de décision multidisciplinaire et potentiellement améliorer la qualité des soins aux patients. » On comprend parfaitement qu’il existe un problème de sémantique d’une part, mais on regrette aussi l’absence d’un Universitaire expert dans l’Apprentissage du Raisonnement Clinique (ARC) pour apporter des outils de réflexion à la pédagogie comme l’indique Oliver Thomson. Sur ce dernier point, je suis également surpris que lors des différentes interventions, on parle des étudiants, des évaluations et des outils pour mesurer in vivo les processus en cours auprès des apprenants, mais on ne parle pas ou peu du manque de formation ou de compréhension des processus en action dans l’Apprentissage du Raisonnement Clinique chez les formateurs. Malgré les différences pour chaque pays, nous partageons tous un point commun, le manque de formation des superviseurs. On retrouve bien une formation (27) proposée par OsEAN pour les enseignants au sein du groupe, mais la certification obtenue reste dans un cadre privé et non universitaire. Il faut tenir compte du contexte actuel de l’ostéopathie en Europe pour comprendre les attentes des différents pays. Par exemple, nos confrères italiens sont en attente d’une procédure de reconnaissance comme profession de santé depuis un vote au sénat en 2016. Un travail commun et réflexif sur la problématique Pour bien comprendre les mécanismes en action dans l’Apprentissage du Raisonnement Clinique, et pour encadrer correctement cette activité, il est intéressant de présenter les données (28) issues de la recherche concernant le raisonnement clinique médical (29). Le raisonnement clinique se définit de la façon suivante : le raisonnement clinique est l’activité intellectuelle faite par le clinicien qui permet l’identification, l’anticipation et la collecte d’informations à partir d’une situation clinique particulière qui l’intègre aux connaissances et expériences antérieures et l’utilise pour arriver à un diagnostic et une prise en charge du patient appropriés. Le raisonnement clinique repose sur 2 pré requis essentiels que sont les connaissances spécifiques et l’utilisation de stratégies de raisonnement clinique appelées processus analytiques. Cette acquisition s’effectue suivant un apprentissage progressif en plusieurs étapes mentionné dans l’article du mois d’août 2016. L’utilisation optimale et efficace de cette stratégie analytique est absolument dépendante de la qualité des connaissances spécifiques relatives à la situation clinique à résoudre. Le clinicien est donc bien en présence d’une situation problème et son expertise consiste à mobiliser des connaissances spécifiques quantitativement adéquates et surtout qualitativement organisées autour de thèmes cliniques. Dans la littérature sur le raisonnement clinique, deux formats (30) sont particulièrement utilisés par le praticien: le script (31) de la maladie et le schéma (32) (ou algorithme). Le premier format est celui du script de la maladie qui suppose que le clinicien a en mémoire une description prototypique de cette entité diagnostique donnée. Par exemple, avec une hypothèse « embolie pulmonaire », il active en sa mémoire le script de cette pathologie qui comprend à la fois les signes et les symptômes prototypiques ou habituels de même que les facteurs prédisposant à la survenue de cette maladie. Les éléments contenus dans un script possèdent une sensibilité et une spécificité qui alimentent la cueillette d’informations cliniques auprès du patient.


