ψ26 – De La Nécessité De Manipuler (AR)

Les débuts de l’ostéopathie, quelle que soit la branche à laquelle on s’intéresse, font toujours état de manipulations. Ainsi, l’ostéopathie structurelle décrite par Still en 1874, l’ostéopathie crânio-sacrée mise en place par Sutherland en 1929 et l’ostéopathie fonctionnelle initiée par Thure-Brand en 1890 passent toutes par une résolution intentionnelle des dysfonctions : le thérapeute décide et réalise une ou plusieurs techniques de traitement. Dans le consensus établi en ostéopathie humaine française, les traitements sont même limités aux techniques structurelles. Pourtant, il est classique de ressentir sous ses doigts une remise en ordre de dysfonction ostéopathique avant ...

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3 réflexions sur “ψ26 – De La Nécessité De Manipuler (AR)”

  1. Pascale Coatantiec

    De La Nécessité De Manipuler (AR)
    16 février 2009 04:45, par Eric Degen

    Un week-end entier de réflexion, ce n’est pas de trop pour tenter d’amener mon grain de sel à ton article passionnant, Stephan.

    J’ai bien aimé la trame qui t’amène à envisager la question du couple patient-thérapeute sous un angle original. Il me semble cependant que tu as un peu baclé la faim (je la laisse) et c’est sur tes deux derniers paragraphes que je voudrais réagir.

    Tu écris : « En partant de l’une ou l’autre des hypothèses, il s’avère que l’organisme patient prend en quelque sorte « modèle » sur l’organisme thérapeute, et favorise donc ainsi ses capacités d’autoguérison. » Certes, mais à mon sens, l’autoguérison est moins une vague probabilité de résoudre tout seul ses problèmes, que l’expression des possibilités inhérentes à chaque organisme de réaliser ce qui est le meilleur (le plus économique, ou écologique ?), à chaque instant, pour lui-même.

    Dans ce sens, le thérapeute souvent lui-même non dénué de compensations plus ou moins profondes n’est malheureux, que si, n’étant pas profondément pénétré du concept d’autoguérison, il se tient, en quelque sorte, à distance de lui-même. Il est, par exemple, dans la situation où il soigne chaque manifestation exprimée par son organisme sans se soucier de sa propre globalité. Il éteint les incendies de son corps, de telle ou telle manière (y compris en se faisant manipuler par un ostéopathe), sans chercher à comprendre le langage de son organisme personnel. Il fait ce que font malheureusement beaucoup de thérapeutes à notre époque ( toutes disciplines confondues) : proposer au public un service qu’il s’avère incapable de se rendre à lui-même. Un peu comme un boucher qui serait végétarien…

    J’enchaîne. Si l’autoguérison est « ce qui est possible », il ne saurait être question de perfection. Tu écris : « La conséquence est que ce type de soins ne peut-être qu’incomplet, pour ne pas dire imparfait. À moins pour le soignant d’être dans une parfaite condition, tant physique que mentale. » Là, pour moi, tu confonds donc l’ambiance qui baigne le couple patient-thérapeute et la réalisation du soin lui-même. Celle-ci ne se conçoit en termes de complétude ou de perfection qu’en isolant dans le temps le fait, à la manière dont opère la médecine « scientifique » : Je t’ai guéri, cheval, de la dysfonction XY qui, te faisant mal au dos, t’empêchait de travailler correctement, et peu m’importe que, trois mois plus tard, tu développes une piroplasmose qui va peut-être te tuer, en tout cas te laisser sur le flanc pour un moment, on est dans une autre histoire, qui ne saurait remettre en cause le résultat de la précédente, non mais des fois ! Alors que celle-là (l’ambiance qui baigne…), initiée par la demande du patient, est sous la responsabilité du thérapeute, conscient de ses propres capacités d’autoguérison. On reste toujours dans la même histoire. Une histoire de tendance, celle qui pousse tout organisme vivant à évoluer, et d’intention, celle qui guide l’organisme du thérapeute conscient vers le meilleur, pour lui et pour les autres (asymptote).

    Et alors, tu peux écrire la fin que j’aime bien sans en changer un mot : « Cela nous donne une raison de plus pour poursuivre notre chemin, du mieux que nous le pouvons. » J’allais le rire.

    1. Pascale Coatantiec

      De La Nécessité De Manipuler (AR)
      19 février 2009 13:20, par Stéphan Cayre

      Bonjour à tous, et particulièrement à toi, Eric, qui a pris la peine -et le temps- de « saler » ma proposition d’article.

      A mon tour donc de te répondre, ce qui me semble la moindre des politesses, et autant le faire ici, pour que tout le monde puisse en profiter. Si par hasard, quelqu’un voulait bien attiser la discussion, j’en serais ravi. Je reprendrais tes propos en italique, non pas pour me « défendre » de quoi que ce soit, mais pour essayer de faire avancer les choses, sur une partie du sujet qui n’est d’ailleurs pas le corps de l’article !

      L’idée de mon pauvre « baratin » est de lancer une réflexion sur ces fameuses dysfonctions qui disparaissent d’elles-mêmes lors d’un soin ; tu élargis à partir de là sur la relation patient-thérapeute, cela amène donc quantités de questions qui auraient pu faire l’objet d’une riche interaction précédemment…

      à mon sens, l’autoguérison est moins une vague probabilité de résoudre tout seul ses problèmes, que l’expression des possibilités inhérentes à chaque organisme de réaliser ce qui est le meilleur

      Je te rejoins dans cette idée, tu proposes d’ailleurs là –me semble-t-il- une bonne définition de l’auto-guérison. Pourtant, cela n’empêche en rien pour l’organisme l’utilisation de sources exogènes d’informations dans le but de réaliser le meilleur possible pour soi-même ; et c’est en ce sens que j’écris que l’organisme patient prend « modèle ». Il serait peut-être plus judicieux de le formuler par prend « source » dans l’organisme thérapeute.

      le thérapeute souvent lui-même non dénué de compensations plus ou moins profondes n’est malheureux, que si, n’étant pas profondément pénétré du concept d’autoguérison, il se tient, en quelque sorte, à distance de lui-même

      Le fait que des dysfonctions du patient se normalisent seules ne devrait pas rendre le thérapeute « malheureux ». Personnellement, cela m’émerveille toujours ! Mais effectivement, comme tu le souligne, si le fond du thérapeute est d’être dans une relation de pouvoir avec son patient, on peut comprendre que cela soit démotivant (et c’est tant mieux, oserais-je ajouter…). Je reste néanmoins persuader que chercher la perfection, même si c’est un point de vue idéalisé du thérapeute, est l’essence même de notre choix de vie (on pourrait tout aussi bien être moine, par exemple). Et c’est bien là toute mon idée.

      Là, pour moi, tu confonds donc l’ambiance qui baigne le couple patient-thérapeute et la réalisation du soin lui-même. Celle-ci ne se conçoit en termes de complétude ou de perfection qu’en isolant dans le temps le fait, à la manière dont opère la médecine « scientifique »…Alors que celle-là (l’ambiance qui baigne…), initiée par la demande du patient, est sous la responsabilité du thérapeute, conscient de ses propres capacités d’autoguérison

      La différence entre l’ambiance du soin et le soin sensu stricto est fondamentale : L’ambiance du soin est un outil –certes initié par le patient- qui est utile au thérapeute pour réaliser « son soin », ou du moins l’acte qu’il pense être son soin. Le soin lui-même est –quasi à l’inverse- un outil du patient pour évoluer sur son propre chemin de vie, ou pour ne pas évoluer parce qu’il refuse d’écouter son organisme et qu’il veut aller à son encontre, mais là c’est un autre débat, passionnant au demeurant. Dans tous les cas, je conçois la perfection comme une limite, au sens mathématique du terme, à atteindre, et non comme un état avéré.

      J’allais le rire.

      Et on retombe effectivement sur mes pattes, ou plutôt, si tu préfères, là où je voulais en venir : nous ne sommes thérapeutes que par égoïsme, quel paradoxe !

      1. Pascale Coatantiec

        De La Nécessité De Manipuler (AR)
        27 février 2009 06:06, par Eric Degen

        Salut à vous tous et bien sûr à toi, Stephan, c’est bien, en effet, de débattre en public, en tout cas, c’est grec.

        Je vais y aller en suivant le plan de ta lettre, donc si vous voulez suivre, vous devrez mettre les deux textes côte à côte, allez, en voiture.

        Tout d’abord, préalable, pas de question d’attaque ou de défense entre nous, on est sur le plan des idées, donc on confronte, et même si on n’est pas d’accord, il ne saurait exister d’affront entre nous, on pose nos lobes frontaux côte à côte, on n’essaye pas qu’un des lobes l’emporte, non mais, on n’est pas des cerfs…(et même les cerfs…)

        Modèle ou source, ça se discute en effet, l’important (et c’est là, je pense que tu me rejoins) étant de considérer qu’à l’instant du soin, il se crée (ou ne se crée pas) un accord entre deux organismes qui, le temps du soin, sont homologues. C’est là mon (notre donc) idée de l’acte de soigner, à la base de ce que j’entends par « ostéopathie des mammifères » (d’ailleurs, tout ce que je ne dirai pas ici sera à lire ou à entendre en juin à St Girons). Quand je soigne une vache, je dois être « de la vache », de même que lorsque je soigne un humain, je dois m’accorder avec lui, afin qu’il puisse, en confiance, me raconter de quoi il ressort. Je note que tu valides ma définition de l’autoguérison et j’en suis très heureux.

        Ensuite, on a un léger malentendu sur le sens de « malheureux ». Si tu relis ma première réponse à ton texte initial, tu verras que j’ai décortiqué tes dernières lignes point par point. Ainsi, le moment dont tu causes correspond à ta phrase (que je n’ai pas recopiée, j’aurais dû) : « Malheureusement, le thérapeute est souvent lui-même non dénué de compensations plus ou moins profondes ». Je ne mettais donc pas en question l’avis qu’il peut avoir sur la normalisation des dysfonctions du patient avec ou sans son accord, mais plutôt sa propre capacité à concevoir ce qui se passe en lui.

        En fait donc, je pense qu’on est assez profondément en accord tous les deux (je m’en doutais, d’ailleurs, je me suis toujours très bien entendu avec le type de playboy méditerrannéen que tu représentes à mes yeux). La preuve, je la trouve un peu plus loin, quand tu écris ce que tu entends par « perfection ». As-tu noté que « je conçois la perfection comme une limite, au sens mathématique du terme, à atteindre, et non comme un état avéré » correspond très exactement au terme « asymptote » placé entre parenthèses dans ma réponse ?

        Je dirai donc : se rapprocher de la perfection tout en sachant qu’elle ne sera jamais atteinte, car sinon c’est se prendre pour l’autre, là, comment tu l’appelles, Dieu ?, et si vous avez bien lu les deux premiers chapitres de l’ostéo des mammifères, c’est justement pour moi ce qui éloigne définitivement toute entreprise de la catégorie « scientifique ».

        Et on retombe en effet sur tes 4pattes, sauf que je n’y vois pas de paradoxe (là je chipote mais c’est mon côté juif polonais), puisqu’on le sait bien « charité bien ordonnée commence par soi-même », ou si tu (vous) préfères la version laïque « fais aux autres le bien que tu aimerais qu’ils te fassent, ne fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas qu’ils te fissent », traduction exacte du terme « Fraternité », dans la devise de notre beau pays.

        Fraternellement donc, Eric.

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