La tendinite de De Quervain

Définition médicale

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La tendinite de De Quervain, ou ténosynovite (1) sténosante (2) de De Quervain est classée parmi les affections rhumatologiques en Médecine Générale. D’après L.Simon, F Blotman et J Claustre dans Rhumatologie Chez Masson éditions 1980, il s’agit d’une inflammation (3) sténosante (2) de la gaine synoviale commune aux tendons des long abducteur et court extenseur du pouce, au passage sur la styloïde radiale (4).

Apparition : Sans cause (5), ou après un choc (6). Elle peut être bilatérale (7).

Douleur : La gêne de la main est globale avec douleur (8) près de la styloïde radiale, et irradiant vers le haut (9) (avant-bras) et vers le bas (9) (pouce).

Une tuméfaction de la styloïde radiale est observable (10) et la flexion du pouce déclenche la douleur (11). Le test (ou manœuvre) de Finkelstein consiste à opposer le pouce vers le cinquième doigt et à rajouter l’adduction du poignet, déclenchement de la douleur.

Très classiquement sont conseillées les infiltrations (cortisone) (12), l’immobilisation (13) et la chirurgie par résection de la gaine synoviale augmentée de volume et fibrosée (14).

Rappel anatomique :

Les tendons du poignet
Les tendons du poignet

Le croisement est l’un des points clés. Ces deux muscles surcroisent (15) les longs et courts extenseurs radiaux du carpe (anciens premier et deuxième radiaux) muscles en travail permanent d’extension du poignet (dans le travail informatique, par exemple), avant de s’engouffrer sous le rétinaculum (16) des tendons extenseurs.

Participant à l’extension et surtout l’abduction du poignet et du pouce (par exemple dans la saisie d’une casserole), ils sont sollicités dans tous les mouvements professionnels avec tenue d’outils lourds…

Leur innervation provient de la branche profonde du nerf radial (17).

Guy Lazorthes nous apprend par son ouvrage « Système nerveux périphérique » chez Masson, que le nerf radial a la particularité de voir se développer, en cas de paralysie (18) de ce nerf, une synovite hyperplasique (19) (tumeur dorsale du carpe de Grüber), d’origine mécanique et liée aux frottements des tendons sur l’os. Par contre les troubles vasomoteurs et trophiques sont moins marqués (20) qu’avec les nerfs Cubital ou Médian.

Si l’on considère l’innervation sous l’angle radiculaire, la région styloïde radiale, base externe du pouce, bord externe de l’avant-bras est innervée par la racine C6 (21), sortant entre C5 et C6.

Raisonnons maintenant en termes d’additions de facteurs de risques (22) (Pascal) et non en cause unique (Descartes).

Discussion point par point :

Appuyons-nous tout d’abord sur la description des spécialistes en rhumatologie, car leur point de vue est l’issue de longues observations concrètes dont chaque détail est une clé de l’ensemble.

1) Ténosynovite signifie que la tendinite de De Quervain n’est pas une inflammation simplement des tendons mais des tendons et de la synoviale (à mettre en rapport avec 19).

2) Sténose ou rétrécissement comme on peut l’observer dans les ischémies ou anoxies des tissus.

Les tendons du carpe : profil
Les tendons du carpe : profil

3) Comme l’exprime fort bien le corps médical, l’inflammation est sténosante. C’est l’issue d’un processus de réparation (inflammation) qui entraîne le rétrécissement, source lui-même de nouveaux problèmes, mécaniques.

4) Le passage de la styloïde radiale représente une zone étroite source de contraintes mécaniques exacerbées par la nécessité de courbure contre ce relief osseux selon les positions du poignet.

5) « Sans cause » est une affirmation liée à la fierté médicale. Il serait plus juste de dire humblement « dont on ne connait pas la cause », ce qui incite plus à la rechercher.

6) La survenue initiale d’un choc déclenche une inflammation logique. La question devient : Pourquoi l’inflammation perdure-t-elle au-delà du temps de cicatrisation classique ?

7) La bilatéralité, fréquente, ne coïncide pas avec l’hypothèse d’un problème localisé mais plaide en faveur d’un problème central, le rachis cervical, distribuant volontiers les mêmes effets à droite et à gauche.

8) La douleur est le motif qui a amené le (la) patient(e) en consultation. Elle est liée à l’inflammation et à la perte de facilité de passage des tendons dans leur gaine. Elle sera un excellent indicateur de l’évolution-amélioration. Elle peut servir pour la manœuvre de Finkelstein.

9) L’extension de la douleur suit éloquemment le territoire radiculaire C6.

10) La tuméfaction de la styloïde radiale s’observe au bout de quelques temps et correspond au remaniement tissulaire de la zone, englobant les tissus fibreux et osseux. L’inflammation a toujours pour but de déblayer des tissus morts pour en reconstruire d’autres.

11) La douleur est provoquée, comme dans la manœuvre de Finkelstein, par le coulissement serré du tendon du court extenseur dans sa gaine, rétrécie.

12) La cortisone, comme dans tous les cas d’inflammation, vient, entre autres, contrecarrer les effets dynamisés de l’adrénaline circulante (dénervation).

13) La mise au repos calme forcément les choses, mais dès la reprise de mouvement, la cause n’étant ni identifiée ni traitée, les douleurs reprennent, souvent de plus belle. De plus l’immobilisation, comme les douleurs, sont souvent causes d’arrêts de travail, à l’issue desquelles le salarié ne peut reprendre comme prévu, ce qui peut engendrer des difficultés sur le lieu de travail.

14) La chirurgie a l’intérêt didactique de nous montrer l’existence d’une gaine synoviale augmentée de volume et fibrosée. C’est le lieu du remaniement essentiel engendrant la problématique et les difficultés mécaniques. A mettre en rapport avec 19.

15) Le surcroisement est une difficulté supplémentaire pour ces tendons qui doivent donc s’incurver sur les tendons des extenseurs radiaux du carpe quand ceux-ci sont contractés, puis s’incurver selon la styloïde et la position du poignet. Ceci concerne beaucoup de positions de travail moderne (facteur mécanique).

16) Le rétinaculum ou gaine fibreuse plaque ces tendons contre la styloïde.

17) Bien que décrit comme provoquant peu de troubles neuro-végétatifs, le nerf radial comporte un contingent sérieux de fibres sympathiques. Ses effets modérés en cas de compression(20) vont masquer cette manifestation d’inactivité des fibres sympathiques, qui est plus bruyante dans le cas de la périarthrite scapulo-humérale ou dans le canal carpien avec la compression du nerf médian. Ce cas de figure attire moins l’attention.

18) Une paralysie n’est évidemment pas le cas qui nous intéresse, mais une compression du nerf radial, ou de l’une de ses branches peut mimer la paralysie sur un territoire précis, avec sursensibilisation des tissus à l’Adrénaline.

19) La synovite hyperplasique est le lien, le chaînon manquant entre le nerf radial et la tendinite de De Quervain, avec son hyperplasie de la gaine synoviale des tendons du long abducteur du pouce et du court extenseur du pouce. Mais à ce moment-là pourquoi seulement ces tendons ? Voir 21.

20) Ce « silence » relatif vasomoteur et trophique participe à la dissimulation de la vraie nature de cette pathologie.

21) Comme d’habitude l’une des réponses vient de l’Anatomie, qui reste l’alliée essentielle de l’Ostéopathe. L’hypertrophie synoviale est localisée parce que ces tendons sont innervés par la racine C6. Il est probable que l’ensemble du nerf radial ne soit pas touché mais seulement cette racine cervicale.

22) Maintenant, additionnons les facteurs de risque pour comprendre enfin ce qui se passe.

– La racine C6 subit un écrasement partiel par pincement discal.
– Les fibres de C6 sont en partie inhibées.
– La réponse d’inhibition sympathique déclenche une hypertrophie de la synoviale qui nous intéresse, celle des tendons long abducteur du pouce et court extenseur du pouce.
– Cette réponse est localisée du fait des difficultés mécaniques particulières de ce secteur anatomique.
– Les difficultés mécaniques peuvent être renforcées par un travail moderne, mains en extension avec préhension fine (informatique) ou main en abduction ou adduction permanente, ou avec port et efforts latéraux avec des outils lourds…
– Le serrage et le frottement s’accompagnent d’une discrète vaso-constriction liée à l’augmentation tissulaire de la réactivité à l’adrénaline des tissus dénervés ( Guy Lazorthes). L’adrénaline est vasoconstrictrice des tissus périphériques, peau, muscle superficiels et tendons (limitation des hémorragies dans le combat animal).
– La vasoconstriction entraîne une anoxie des tissus, ici les tendons et l’apophyse styloïde proche.
– Une inflammation de réparation s’ensuit, avec douleurs et remaniements des tissus.
– Au final, le phénomène s’auto entretient, surtout si le pincement C5-C6 n’est pas soigné, c’est-à-dire dans certains cas, pendant des années.

Traitement ostéopathique

Bien entendu, le but visé étant de libérer la racine C6 dans son passage rachidien, tout traitement commence par le classique traitement ostéopathique que connaissent tous les Ostéopathes Exclusifs. Je ne m’étendrai pas sur le traitement des pieds, du rachis, du bassin, de la boîte crânienne, de la posture parfois, ou de toute autre dysfonction diagnostiquée par l’Ostéopathe avec un soin particulier pour le membre supérieur et ,bien sûr, le poignet. Une fois cela réalisé, le sujet étant bien rééquilibré, il est utile pour voir régresser cette véritable névralgie neuro-végétative de décompresser la racine C6 en traitant le disque C5-C6 par induction. Dès que l’espace compris dans le périmètre du trou de conjugaison s’améliore géométriquement, la tendinite disparaît comme elle s’est installée, en quelques jours. L’innervation rendue à la normalité stoppe l’hypertrophie synoviale et surtout élimine l’hypersensibilité des tissus à l’Adrénaline, ce qui permet le retour d’une vascularisation normale, la réparation des tissus puis l’arrêt naturel de l’inflammation, devenue inutile.

L’ensemble de ce protocole de soin ostéopathique peut être réalisé en huit à dix jours avec un taux d’efficacité de 94 %. Amélioration totale dans un délai de 15 à 21 jours. Les 6% d’échecs sont liés à des hernies discales, beaucoup plus difficiles à traiter.

Références

  • Le système nerveux périphérique Guy Lazorthes, Masson.
  • Kamina Anatomie clinique Tome 1 anatomie générale – membres 3e éditions Maloine
  • Cours de Médecine PCEM1 Pr Kamina Poitiers 1979.
  • L.Simon, F Blotman et J Claustre. Rhumatologie Chez Masson éditions 1980.

1ère publication sur le Site de l’Ostéopathie le 29-10-2010

 

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